Grand oral à l’UE : Les Nigériens sont allés prêcher dans un désert
mercredi 9 décembre 2009.
Hier mardi 8 décembre 2009, une délégation du gouvernement nigérien, conduite par le Premier ministre, Alio Badio Gamatié, devait être entendue par l’Union européenne (UE) à Bruxelles.
De par la volonté du président Mamadou Tandja de sacrifier sur l’autel de l’insouciance toutes les institutions de la république pour rester scotché à son fauteuil, le Niger est plongé depuis dans une crise sociopolitique. Epreuve de taille, ce grand oral l’est vraiment pour l’avenir des relations du pays d’Hamani Diori avec ses partenaires au développement. La délégation devait être reçue par la Commission dans le Palais de l’Europe pour faire des propositions acceptables de sortie de crise.
En rappel, début novembre, précisément le 3, un ultimatum de 30 jours avait été donné au Niger par l’UE pour entamer des consultations avec elle. Injonction lui a été faite d’acheminer à l’Union un carnet de route pour revenir à une vie constitutionnelle normale qui inclurait tous les acteurs de la scène politique du pays, à savoir l’opposition et la société civile.
Décision avait alors été prise de lui suspendre quelque 180 millions d’euros d’aide budgétaire. En outre, l’institution européenne a même menacé de rompre définitivement ses relations avec le pouvoir de Niamey. Raison évoquée, le Niger, qui figure parmi les plus pauvres au monde, depuis plusieurs mois patauge dans une crise politique sans précédent, situation créée par le président Mamadou Tandja, dont le deuxième mandat, n’eût été la constitution taillée sur mesure, arriverait à expiration le 22 décembre 2009.
Coup sur coup il a dissous en août dernier le Parlement et la Cour constitutionnelle, organisé un référendum autorisant une rallonge de sa mission jusqu’en 2012. Deux mois plus tard, ont eu lieu les législatives, boycottées par l’opposition. Contre la machine Tandja, qui écrase tout sur son passage, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui n’approuve pas l’entêtement du premier des Nigériens, a alors décidé de suspendre son pays de ses instances et réclame un retour au statu quo (constitutionnel) ante.
L’Union africaine (UA) également n’y est pas allée de main morte et a condamné la situation, même si elle peine à prononcer des sanctions contre le Niger. La rencontre d’hier devait se faire en présence des représentants des institutions sus-mentionnées, qui font chorus face à la « dérive en cours au Niger » pour exiger le retour sans condition à l’ordre constitutionnel antérieur.
A l’extérieur des lieux où le chef du gouvernement nigérien devait présenter le mémoire en défense de son pays, la diaspora nigérienne et des associations de défense des droits de l’homme devaient organiser une manifestation pour demander le départ du président Tandja de la tête de l’Etat.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que la délégation nigérienne a certainement eu des difficultés à convaincre ses vis-à-vis de la justesse des tripatouillages opérés par le chef de l’Etat. Les menaces de l’UE ne peuvent alors qu’être mises à exécution, et c’est tout de même dommage pour le Niger, qui risque de perdre un soutien financier de poids, vu que près de 60% de son budget provient de l’aide extérieure et principalement de l’Union européenne ; une enveloppe de 180 millions d’euros, ce n’est quand même pas rien dans la balance de l’économie du Niger qui, en attendant peut-être de commencer l’exploitation de son or noir, devrait fébrilement s’arracher les cheveux pour trouver des solutions permettant de combler durablement le manque à gagner.
Durablement est vraiment le mot, car, au titre du 2e FED (Fonds européen de développement), l’Europe des 27 privera éventuellement Niamey de la somme faramineuse, tenez-vous bien, de rien moins que 400 milliards de francs CFA.
Et tous ces nuages s’amoncellent sur ce pays au moment où, du fait des changements climatiques, une pénurie de grains y a déjà cours. C’est dire que les folies de Tandja pourraient être très cher payées par toute sa nation. Sans sommation, l’UE aurait pu appliquer ses sanctions à l’encontre du Niger. Mais, comme on peut le constater, en optant d’entrebâiller la porte, elle a voulu donner au pays de Tandja la possibilité de se racheter. L’homme fort de Niamey saura-t-il saisir la balle au bon, ou persistera-t-il et signera-t-il ? préférant faire la sourde oreille, passer son chemin et laisser le chien aboyer vainement ? L’avenir nous le dira.
D. Evariste Ouédraogo
L’Observateur Paalga
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